-Oui, fit le sénateur de l’Indiana, brossant un tableau éloquent de la situation prévalant à Nassérah, Bark ajouta :

-Si tu veux avoir un résumé plus élaboré, tu peux en parler directement à Jobran Afiya ?

-Je voudrais bien. J’aimerais être informé, il n’est pas question d’y aller les yeux bandés.

-Jobran t’appellera demain à votre bureau, ta seule présence chez sa parente sera d’un apport considérable, affirma le jeune sénateur Arabe. Pedro De Chavez observa un court instant son visiteur. La mine grave il dit :

-Je suis moi-même indien par ma grand-mère paternelle, je suis porteur d’une identité assassinée. Je sais de quoi souffrent les Arabes d’Israël mais…Il s’interrompit. Les mots ne voulaient pas sortir.

-Les Israéliens ont vaincus par traîtrise. Il n’en demeure pas moins que nous autres Palestiniens nous n’abdiqueront jamais car il y va de notre existence sur la terre sainte.

Un silence accueillit cette déclaration. Un petit coup sur la porte précéda l’apparition de Angela De Chavez :

-Il est temps pour vous messieurs de faire honneur à notre dîner .  

4

-Magnifique, nous avons un sacré couple sur les bras ! Fit lugubre Mochd. Godom, Fedok et le maire Gouvim réunis informellement venaient d’apprendre le mariage de Ayam El Aed .

-Bah !Fit le lieutenant colonel, nous sommes sûrs et cela en vertu des assurances de Hibom que le juge Menachir jugera en notre faveur.

Mochd eut un air sinistre en disant :

-Je me méfis et à juste raison de la justice, particulièrement des tribunaux de province. Notre pouvoir juridique éprouve une compassion maladive pour ces vils arabes ; c’est pourquoi je ne dirais ouf qu’a l’annonce du verdict .

-Eri a raison, Menachir est un juge impeccable mais nous ne devons pas nous endormir sur nos deux oreilles, conseilla le maire. Fedok, vexé, dit :

-A vous entendre, on douterait de cette vérité inébranlable que plus de la moitié des terres des arabes, nous les avons eues par le jugement de personnes telles que Menahem Menachir.

Godom écoutait, l’air absent, les propos de ses pairs. L’intervention de Mochd lui mit les nerfs en boule :

-Eri change de langage, veux-tu ? A t’entendre nous sommes des traîtres ! Fit-il, l’air terrible. Mochd protesta vigoureusement :

-Savez-vous qu’un Israélien voisin de l’est des El Aed a célébré le mariage en tirant un coup de semonce dans l’air avec son fusil de chasse ?

Cette diversion déplut à Fedok. Silencieux, il entendit Godom dire:

-C’est extrêmement intéressant, personnellement, je connais Raoul Vidom, un Ashkénase de la Russie Blanche, il hait les El Aed. Tiens ! Nous pourrons exploiter sa haine à bon escient.

-A la bonne heure ! Apprécia Mochd. C’est comme cela qu’on doit agir, s’en remettre au jugement des juristes est parfois dangereux .

Le maire fit :

-N’anticipons pas, après demain le jugement sera prononcé. Quarante - huit heures de retard n’est pas grand chose au regard de ce que nous allons gagner.

-Si nous gagnerons bien sûr dés la première manche, fit derechef Mochd. L’autre approuva de la tête :

-Eri, crois-moi tu auras les mains libres ce mercredi.

Mochd regarda Godom. Celui-ci approuva de la tête. Fedok se retira quelques minutes plus tard. C’était l’heure de son inspection sur le terrain. Descendant au parking, il monta à bord de son véhicule de fonction. C’était le genre d’homme qui se passait des privilèges ; il conduisait lui-même. En démarrant il perçut le bip bip de son portable. Décrochant, il fit :

-Allo ! Ici Fedok.

-Ephraïm Nidock en ligne, fit la voix de l’élu du parti travailliste :

-Oui ? Fit interrogateur Fedok.

-Pardonne ma franchise, tu es le maillon faible dans le cercle fermé, Mirah refuse catégoriquement d’enquêter sur les circonstances obscures de la mort de Zakariya El Aed et cette affaire d’expropriation prend l’allure d’un drame israélo-arabe, me comprends-tu ?

-Ephraïm, n’as-tu pas tendance à dramatiser la chose toi-même ?