Mr Vern Barnet nous avait expliqué que les onze mets du repas de Thanksgiving ( journée d’actions de grâce célébré aux Usa au quatrième jeudi de novembre ), étaient pour faire ressortir la richesse de l’héritage du passé avec les espoirs du futur. Et un tel repas est entrecoupé par des hymnes et généralement pour apprécier tous les plats à base de viande, cela prend deux heures de temps.

En arrivant au temple Juif, une file d’invités nous précédaient, curieuse, je détaillais les gens. Dans la foule, je n’avais pu repérer les représentants de la communauté Musulmane, une fois de plus, je constatai combien la communauté Juive sioniste était influente. Nos hôtes, nous recevaient avec de grands sourires et veillaient à échanger quelques paroles de bienvenue avec chacun des invités.

Soudain la voix de Sara non loin de moi attira mon attention :

-Où est passé madame Nahla ?

-Elle était là, il y a une minute, lui avait-je répondue.

Nos collègues hommes s’étaient dispersés ici et là, et comme je suivais ma sœur Tunisienne dans un grand vestiaire, où nous avons accrochés nos manteaux, je fis observer :

-Sara, j’espère que nous avons liberté de nous retirer quand nous le voulons ?

-Oui, nous ne sommes pas obligés d’assister à toutes les étapes de la cérémonie mais il faut que les autres membres de la délégation consentent à partir tôt.

Je hochai la tête, dans le hall qui menait à la grande salle où était dressé une énorme table longue de plusieurs mètres, vint au devant de nous, notre collègue Jordanienne Madame Nahla :

-Où étiez-vous, madame ? Lui avait dit Sara.

-Je suis à la recherche de Sheila Sonnenschein, répondit distraitement la jordanienne puis soudain apercevant l’intéressée non loin d’elle, elle s’exclama, ravie :

-Oh la voilà ! je vais aller la saluer, excusez-moi.

Sara et moi on virent la dame Jordanienne, courir presque vers la juive sioniste Américaine et l’étreindre dans ses bras en la saluant chaleureusement !!

Moi et ma sœur Tunisienne, on s’étaient regardés sidérées !!

A cet instant, je ne sus pourquoi, je ressentis au plus profond de moi-même le mépris que devait ressentir envers nous, cette Américano-sioniste ! Ils nous volent la terre sacré de l’Islam, la Palestine nous massacre impunément quand ils le veulent et où ils veulent. Ils nous asservissent par tous les moyens sophistiqués que leur procurent leurs avances technologiques et nous, tout ce que nous réussissons à faire c’est de leur demander qu’ils nous avilissent davantage !!

En m’asseyant à la table où mon nom était mentionné sur un carton, j’avais une mine tellement sombre que la dame près de moi m’avait demandé, si tout allait bien pour moi.

Je répondais forcée que oui.

Essayant de concentrer mon attention, et de me ressaisir je prenais la brochure placé devant mon assiette, et j’essayais de lire les strophes des hymnes.

Puis je réalisais que le dîner était un self service, donc je devais me lever et aller choisir quelques mets disposés sur une immense table près d’une estrade.

Je choisis tout ce qui était légumes, évitant les viandes et à leurs têtes la dinde, le plat royal du thanksgiving.

Je choisissais l’esprit préoccupé par le constat que je venais de faire. Cette Arabe Jordanienne marié à un Palestinien. Vivant séparé de lui, elle avec ses fils à Aman et lui en Cisjordanie aucun scrupule ne l’avait étouffé pour qu’elle aille serrer contre elle une femme sioniste dont les siens avaient dépossédés son mari et son peuple de leur terre.

Il y a des moments dans la vie où la personne est confronté à des vérités tellement abjects, qu’elle est obligée de recourir à sa foi pour pouvoir garder toute sa raison. La traitrise, la fausse foi et la peur de la mort sont autant de facteurs qui font que les peuples et les élites politiques et intellectuelles musulmans choisissent le camp des ennemis héréditaires de l’Islam et de Allah.

Comme c’est si facile de dire les Israéliens ont raison d’usurper la terre de Palestine et comme c’est si difficile de dire que la Palestine est une terre Musulmane et qu’aucunement elle ne pourra être Juive !!!

Prenant aussitôt les ascenseurs, nous avons atteint un vaste étage où s’avoisinaient des devantures luxueuses de parfums, les préposées à la vente étaient des jeunes femmes qui reflétaient le caractère multi-éthnique de la société Américaine. Une vendeuse Iranienne, en apprenant par l’entremise de Sara nos nationalités, tint à nous présenter des parfums avec des prix abordable.

Je laissais Sara et la dame Jordanienne faire leurs choix et je profitais de l’occasion pour discuter avec la vendeuse :

-       Excusez-moi madame mais êtes-vous une de ces Iraniennes qui s’est exilée volontairement en      Amérique après la révolution Iranienne de 1979 où êtes-vous ici bien avant cette date          ? Lui ai-je demandée.

-       En effet, j’ai immigré aux Usa avec ma famille après la révolution de 1979. C’était au milieu des années 80, en pleine guerre Irako-iranienne, m’avait-elle répondue.

-       La vie à cette époque était vraiment pénible, ai-je fait remarquée.

-       Ma famille n’était pas vraiment chaude à l’endroit de la révolution, nous n’avons pas votés pour une république Islamique, nous croyons que moins les hommes de religion interviennent dans les affaires politiques, mieux le pays se porterait.

En écoutant la jeune femme, je concevais l’ampleur de la désillusion des révolutionnaires Iraniens de gauche, ces derniers alliés aux religieux avaient dû constater à leurs dépends que leur rêve socialiste avait tourné trop court. La dictature capitaliste avait été remplacée purement et simplement par un régime religieux mené par un guide de la révolution dont le pouvoir de contrôle sur l’ensemble des institutions de l’état Iranien devenait de plus en plus pesant avec le temps.

-Non laissez de côté les produits de Estée Lauder, c’est une marque qui soutient ouvertement les Israéliens, conseillait Sara la dame Jordanienne.

Je souriais en mon for intérieur, l’acte de boycotter tout allié des sionistes est devenu dérisoire de nos jours. La prétendue paix entre Palestiniens et sionistes a eu a la longue raison du militantisme des « idéalistes » comme les désignent les promoteurss d’une solution à l’amiable entre occupant et occupé !

Même dans mon pays, je suis en but à ces remarques qui reflètent en faite tout le scepticisme des gens à l’envers d’une cause Palestinienne en perte de légitimité : 

« Pourquoi boycotter l’Amérique ou la Grande Bretagne alors que les politiciens Palestiniens ont abandonnés la lutte armée et s’humilient carrément à quémander une insignifiante parcelle de terre pour fonder leur ridicule état Palestinien ? »

Notre visite du mall s’était prolongé jusqu’à la mi-après-midi, ayant prit un rapide déjeuner dans un fast-food, nous sommes retournés au Quarterage hôtel.

-Sara, veux-tu me donner de plus ample détails sur ce dîner au Temple B’nai Jehudah ? ai-je demandée à ma sœur Tunisienne.

-C’est une rencontre annuelle à l’occasion du Thanksgiving entre toutes les communautés religieuses du Missouri, tu trouveras des Musulmans, des Juifs, mais aussi des Bahai, des Hindous, des Sikhs et les mets présentés seront selon les critères de chaque religion et croyance. M’avait expliquée Sara.

-Est-ce à dire que nous retrouverons Sheila Sonnenschein à ce dîner ? avait alors demandé Madame Nahla.

-Sans doute, avait répondue brève l’interprète.

-Je remarque que les Bahaï sont très actifs dans la société Américaine.

-Oh ! oui, ils sont plus dynamiques que les Arabo-musulmans Américains, avait commenté Sara, ils profitent largement des libertés religieuses et on réussis à s’insérer dans le paysage Américain pour la simple raison est qu’ils investissent tout créneau à leur portée et bien plus, ils ont même installés un lobby au Congrès et ce lobby fait pression sur l’Egypte pour qu’elle reconnaisse le Bahaisme comme une religion officielle, entre parenthèse la communauté égyptienne Bahaï est très importante.

A l’heure convenue, on s’étaient retrouvés dans le hall de l’hôtel. Là, nous avait accueilli aimablement mr Vern Barnet qui allait nous accompagner pour cette soirée. Durant le trajet, il s’offrit à nous expliquer les particularités du repas de Thanksgiving.

Sara fit le ton ferme :

-Ok, c’est compris et se tournant vers l’employée de la compagnie Delta, elle la pressa d’enregistrer mes valises.