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Introduction
Le thème du réchauffement climatique est en train de sortir d’une
relative obscurité pour devenir le problème essentiel du peuple
américain. Partout, dans les États rouges (majoritairement républicains)
et les États bleus (majoritairement démocrates), les
personnes, les familles, les ouvriers et les entreprises ont de plus
en plus peur des variations de temps inattendues et des conséquences
nuisibles sur les écosystèmes : dégâts matériels considérables,
disruption du cycle économique, pertes de vies humaines.
En décembre 2018, un sondage réalisé par le groupe de
recherche de l’université de Yale, nommé le Yale Program on
Climate Change Communication, et le Center for Climate
Change Communication de l’université George-Mason révélait
que 73 % des participants pensent qu’un réchauffement global
est en cours – soit 10 % de plus qu’en 2015 –, et que près de
la moitié (46 %) affirment avoir éprouvé les effets du réchauffement
climatique – soit 15 % de plus qu’en 2015. Qui plus
est, 48 % des Américains sont d’accord pour dire que partout
aux États-Unis les gens « sont affectés par le réchauffement climatique
“en ce moment même” », soit plus de 16 % par rapport
à 2015. Il y a plus inquiétant encore : une écrasante majorité
d’Américains pensent que le réchauffement climatique affecte
la population mondiale pauvre (67 %), les espèces animales et
végétales (74 %) et les générations futures (75 %)7.
Cette volte-face de l’humeur du pays fait suite au nombre
croissant de catastrophes naturelles depuis dix ans. Si le changement
climatique fait tellement peur, c’est qu’il bouleverse
l’hydrosphère de la Terre, essentielle à la vie. La Terre est une
planète bleue. Nos écosystèmes et nos biomes se sont développés
au fil d’un temps infiniment long, suivant les cycles de
l’eau qui parcourent la planète via les nuages. C’est là que le
bât blesse. À chaque degré d’augmentation de la température
de la Terre attribué à l’amplification des émissions responsables
du réchauffement, la capacité de rétention d’eau de l’air croît
de 7 % environ, d’où une précipitation plus concentrée dans
les nuages et la naissance de bouleversements plus violents du
cycle de l’eau8 : températures d’hiver glaciales et records de
neige ; inondations printanières désastreuses ; sécheresses d’été
prolongées et feux de forêt inquiétants ; ouragans mortels de
catégories 3, 4 et 5, suivis de pertes de vies et de biens, et de
destruction d’écosystèmes. Ces écosystèmes se sont déployés
suivant un cycle hydrologique relativement prévisible au fil des
onze mille sept cents dernières années qui définissent l’holocène.
Ils ne peuvent suivre la folle courbe exponentielle qui perturbe
le cycle hydrologique de la Terre. Ils s’effondrent en temps réel,
et sous nos yeux9.
Dans un sondage réalisé après les élections législatives américaines
de 2018, on a demandé aux électeurs leur avis sur le
lancement d’un New Deal Vert comparable au New Deal qui
a sauvé l’Amérique de la Grande Dépression dans les années
1930. Faut-il s’étonner qu’ils y soient très favorables, quelle que
soit leur affiliation politique ?
Le New Deal Vert permettrait de produire 100 % de l’électricité
des États-Unis à partir de sources propres et renouvelables
d’ici dix ans ; d’améliorer son réseau énergétique, son
réseau de transports et le secteur de son bâtiment ; d’augmenter
son efficacité énergétique ; d’investir dans la recherche et le
développement de technologies vertes ; de proposer des formations
pour les emplois nés de cette nouvelle économie. 92 %
des démocrates ont appuyé la proposition, dont 93 % des
démocrates libéraux et 90 % des démocrates modérés-à-conservateurs.
64 % des républicains – y compris 75 % des républicains
modérés-à-libéraux et 57 % des républicains conservateurs
– approuvent aussi les objectifs politiques du New Deal Vert.
88 % des indépendants ont également acquiescé au projet10.
Ce large consensus laisse penser que nous serions à un
tournant qui aurait des conséquences profondes pour les élections
présidentielles de 2020 et au-delà. Le réchauffement
climatique n’est plus seulement un sujet de recherche et une préoccupation
politique à long terme. C’est une réalité effrayante
pour des millions d’Américains qui sentent que leur pays et le
monde sont face à un avenir incertain et angoissant, comme
jamais dans l’histoire de l’humanité.
Extrait du livre de Jeremy Rifkin "Le New Deal Vert Mondial" Editions Les Liens qui libérent, 2019
