Paolo Di Balme déboucha à l’improviste sur une esplanade bordée par l’eau au nord et à sa droite par un bâtiment historique de Venise.
Non loin de lui de drôle de colonne sans plafond parcourait l’espace ouvert. Perdu dans ses pensées, il du se ressaisir. Soudain, il lui sembla percevoir l’écho de pas.
Il écarquilla les yeux, dans ce début de crépuscule, il lui était difficile de séparer ombre de lumière baissante. Il distingua une silhouette, une personne de l’autre côté marchait sans bruit. Son pas est celui de quelqu’un qui a perdu son chemin. S’approchant dans le silence seulement troublé par le clapotis de l’eau, il vit la silhouette se préciser. Une jeune femme d’une trentaine d’année au visage lumineux, au corps drapé dans une longue robe bleu flottante, aux cheveux disparaissant sous une large écharpe soigneusement nouée autour du cou. Ayant l’air de chercher quelqu’un, elle regardait autour d’elle indécise. Au moment où il allait s’avancer lui offrir son aide, il entendit un autre pas venir dans sa direction. Il s’effaça aussitôt derrière une colonne en marbre blanc, un jeune homme passa près de lui sans l’apercevoir et s’empressa vers la charmante apparition. Celle-ci en le voyant enfin, lui dédia un sourire affectueux. Le jeune homme parlant une langue inconnue échangea de courtes paroles avec elle. Tournant un visage éblouie vers l’eau, l’inconnue demeura debout contemplant le magnifique coucher du soleil sur Venise.
Paolo di Balme consultant sa montre voulait s’éloigner mais ses pieds étaient cloués au sol, l’étrange couple à quelques pas de lui l’intriguait, surtout la jeune femme.
Toute sa personne était empreinte de ce charme et de cette grandeur d’âme attributs des femmes d’autrefois, celles-là mêmes qui ornaient les tableaux de sa prestigieuse famille au Palazzo Del Mare. Il était stupéfait ! Jusque là il avait cru que ces femmes appartenaient irréversiblement au passé et voilà qu’en cette fin d’après-midi d’un lundi du mois d’Avril de l'an 2040, il rencontrait au gré d’une de ses promenades en solitaire une femme d’antan. A ce stade de ses réflexions, il du reculer pour se couler dans l’ombre du bâtiment. Les inconnus avaient choisis ce moment pour quitter la place.
Il laissa entre eux et lui une certaine distance, brusquement il se mit à les suivre. Le couple prit une allée qui longeait un mur aux briques d’un rouge usé, il crut que leur intention était d’atteindre un des trois ponts qui rattachaient Venise est à Venise ouest, erreur !!
En arrivant derrière eux quelque peu en retard, il constata que le jeune étranger avait logé son embarcation dans un des angles du premier pont. Etant monté à bord, ils filaient à présent loin devant lui. Il revint précipitamment sur ses pas, courut à sa propre vedette. Sauta dedans et démarra à toute allure. Embrasant la perspective devant lui, il chercha à les repérer, peine perdue !
Il visita patiemment tous les canaux qu’ils pouvaient emprunter. A un canal, il entendit quelqu’un l’appeler :
-Paolo !
Ralentissant, il se tourna et reconnut le seul ami qu’il comptait à Venise. Force était pour lui de renoncer à sa filature sur l’eau et de venir amarrer tout près du quai :
-Eh bien ! Quelle mine tu fais ? Fit Alessandro Fabrecce. Lui tendant la main, il l’aida à poser le pied sur la terre ferme.