Je croyais devenir folle, ragaillardi par la perspective d’un enfant de Issam, mon beau-père me suppliait de me ménager. Le juge Habibi me téléphona pour me dire que la première audience de l’affaire en cours avait été fixé au début du mois. Je prévenais notre avocat Bezigh, les chances de le revoir diminuait de jour en jour, tendue, tenant à un cheveu prés. Chaque jour, j’arpentais la ville dans tous les sens à raison de trois heures. Quelques collègues s’étaient joint à moi, tout à coup et au moment où on s’y attendaient le moins une main inconnue glissa une lettre dans ma boîte. Je la dévorais des yeux, Issam avait été vue pour la dernière fois entre trois individus reconnus pour être des gardes du corps au chef de la police Jasser .Révoltée, je me précipitai au commissariat de ma circonscription en leur hurlant le contenu de la lettre, l’un des hommes présents me demanda de m’asseoir, il me servit un verre d’eau. Prenant le papier, il le lut puis levant les yeux, il me dit le ton solennel :

-Je vous présente mes plus sincères condoléances madame Naïli,le corps de votre mari a été découvert tailladé de plusieurs coups de couteaux à un km à l’ouest de Beitlehm dans une carrière abandonnée.

Tout ce dont je me souviens c’est de m’être évanouie. Des jours durant, je gardai le lit hébétée, l’enterrement s’ensuivit. L’enquête ouverte fut classé contre x au bout de trois semaines, revenant peu à peu à la vie, je fus tenté de tout laisser tombé et de repartir. Un silence s’établit :

-Vous êtes restée .

Les yeux gonflés de larmes, elle déclara :

-Mon enfant devrait naître sur sa terre, Issam est mort pour sa terre. Je me dois de continuer son combat.

-Le terrain a t-il été confisqué ?

-Non, il est toujours en ma possession .

Les derniers rayons du soleil couchant révélèrent les remparts de la vieille ville :

-Nous sommes enfin arrivés, Dieu merci. Murmurèrent des voix autour d’eux. Le paysage de pierre, de cyprès et d’oliviers réfléchissait une nostalgie du passé. S’arrachant à la magie de l’atmosphère, O’Neil fit doucement :

-Le jugement a t-il été en votre faveur ?

-Pas encore, les criminels louvoient et corrompent si bien, j’ai bon espoir qu’ils seront un jour prochain arrêtes et jugés pour leur crime. Je suis plus tenace qu’eux et mon enfant le sera doublement pour nous deux .

Regardant longuement la jeune femme, Peter chuchota d’une voix distincte :

-C’est cette persévérance qui finira par avoir vos ennemis de l’intérieur et de l’extérieur .

Le bus arrêté sur la placette, il l’aida à descendre. Elle aperçut aussitôt son beau-père et son frère Youssef leurs sourires et leurs mines lui fit composer un visage serein :

-Je vous quitte ici Dhoha, un seul conseil écrivez votre histoire avec Issam, c’est la mémoire du combat de votre peuple .

Elle demeura abasourdie au milieu de la foule, venant à son aide, son frère porta son volumineux sac :

-Est-ce que tout va bien ? Lui demanda–t-il avec sollicitude .

-Oui. Fit-elle machinalement en cherchant des yeux O’Neil, la silhouette de celui-ci disparaissait dans le crépuscule, dans sa tête son conseil avait pris racine.

FIN