Bien assise à l’arrière, j’ignorais ma collègue Jordanienne et je fis mine de fermer les yeux, une façon de dire mon refus d’être dérangé ou de me mêler à la conversation.

Sara rassurée, m’avait glissée à voix basse :

-Au Quarterage hôtel, on parlera In Shâa Allah.

Pour ma part, je savais que nous allions rentrer tard et que je n’aurais aucunement envie de parler. En montant à mon étage, Sara m’avait demandé :

-Tu ne t’attardes pas avec nous Afaf ?

-Pourquoi ? lui avait-je demandée.

-J’ai l’intention d’aller au supermarché d’en face, j’ai quelques achats à faire.

-Je viendrais volontiers Sara, si nous passons par une pharmacie, je sens un début de pharingite, est-ce possible ?

-Bien sûr, ici on trouve les pharmacies dans le supermarché et je connais un sirop très efficace, dans dix minutes on se retrouve in châa Allah dans le hall en bas.

-Ok.

La mine fermée, je suivais dans la nuit dehors Sara un quart-d’heure après. La ville était immobile, pas de voiture qui passe, la grande placette qui bordait le supermarché était bien éclairée mais déserte, c’était une chose bizarre de constater que les Américains de Kansas City ne sortaient pas la nuit. En tout cas le froid qui régnait, les auraient sûrement découragés.

-Alors Afaf, tu ne dis rien ? M’avait demandé Sara surprise de voir mon silence.

-Que voudrais-tu que je te dise Sara ma sœur ? ma gorge me fait mal et je n’ai pas envie de parler. Lui avait-je répondue.

-Voyons, pour ton mal cela va passer In Shâa Allah, voici le sirop, il est indiqué que tu dois prendre trois grosse cuillerée pendant la journée, m’avait-elle dit, en mettant dans le panier commun une volumineuse bouteille de sirop.

Puis me regardant, l’air intrigué :

-Je m’attendais de ta part à une réaction vive, n’a-t-on pas vécu chez les Sonnenschein à une partie de la guerre que les palestiniens vivent sur leur terre là-bas en terre sainte !

-Sara, tu plaisantes certainement ! C’est moi seule qui fulminait en mon for intérieur mais pour mes honorables collègues ils se sont contentés d’une mise au point polie faites par le délégué Libyen et c’est tout ! Tu ne les a pas vue comment, ils souriaient à leurs hôtes et comment nos deux collègues dont les pays ont normalisés leurs relations avec l’entité sioniste défendaient chaudement la cause des Israéliens sionistes, l’un des deux a même osé me dire en aparté que le coupable en Palestine est Hamas et non pas l’ennemi sioniste !

Effarée, Sara m’avait dévisagée :

-Oh Non ! Cette personne a eu l’insolence de dire cela ?

-Oui, Sara, pour ma part j’ai enregistré un point de victoire contre nos hôtes ce soir, mais ma déception a été amère quant à la prétendue solidarité Arabe, n’as-tu pas entendu de tes propres oreilles le Palestinien soutenir avec force à table que les Israéliens sont vraiment démocrates en terre de Palestine 48 !!!

Baissant la tête, Sara s’était tu. Un long silence nous suivit dehors, une fois nos achats faits.

-Ecoute que dirais-tu si nous allons prendre une grand verre de café chaud dans ce restaurant fast food là-bas ? M’avait dit tout à coup la jeune femme.

-Sara, prendre un café à 10 heures du soir et puis je n’ai pas l’habitude dans mon pays de fréquenter des fast-food et m’asseoir à une table à cette heure de la nuit, lui ai-je répondue.

-Nous prendrons un de ces cafés légers qui n’auront aucune effet sur notre sommeil, vient le fast-food est désert, tu le vois à travers les vitres et on va prendre de la patisserie, je n’ai pas envie de rentrer à l’hôtel après ce que tu viens de me raconter.